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Emanuele Balestra, l'alchimiste au service de la mixologie

9/07/2024

S'il est des hommes enthousiasmés par leur métier, Emanuele Balestra en fait partie, cela ne fait aucun doute. Aujourd'hui maître mixologue au bar du Fouquet’s de l’Hôtel Barrière Le Majestic à Cannes, ce globe-trotter, passionné de botanique, nous offre une véritable approche avant-gardiste dans la création de ses cocktails.

 

Vous travaillez aujourd'hui comme maître mixologue au bar du Fouquet’s de l’Hôtel Barrière Le Majestic à Cannes. Racontez-nous votre parcours.
J'ai quitté l'Italie à l'âge de 19 ans et ai commencé mon métier de barman en France, au Club Med d'Opio et de Val d'Isère. Après deux saisons, direction la Belgique où j'ai rencontré Giuliano Gianotti, qui m'a initié à l'oenologie, puis l'Ecosse où j'ai découvert le monde du whisky. En 2008, j'ai occupé la place de directeur de bar à la Trump Tower de Chicago avec le concept de Liquid Kitchen, où j'ai commencé à travailler à l'élaboration de sirops et de gelées pour agrémenter mes cocktails de manière originale. Ensuite, fin 2009, j'ai participé à l'ouverture de la Mamounia, à Marrakech, où j'ai pu faire découvrir à une clientèle non habituée la magie des spiritueux. Là-bas, les 2 hectares de potager m'offraient une multitude de possibilités. Je suis ensuite parti 8 mois à l'Île Maurice où j'y ai rencontré Jérôme Faure qui est aujourd'hui mon grand ami et m'a fait découvrir de très bons vins. Enfin, fin 2014, je suis arrivé à Cannes avec l'idée de continuer mon projet lié aux plantes. J'ai alors commencé à étudier la botanique et les insectes, que je trouve passionnants ! Je vais d'ailleurs sortir un deuxième livre, sur la botanique et les fleurs comestibles, à la fin de l'année. Mon but est de comprendre la nature afin de travailler avec elle et de développer dans mes cocktails une véritable émotion. Aussi, depuis 10 ans, j'ai installé des ruches sur les toits de l'Hôtel Barrière Le Majestic pour stimuler la croissance de mes plants, et je travaille avec ses deux jardins aromatiques.

Pour vos cocktails, vous avez créé vos propres parfums comestibles, avec vos propres plantes, en partenariat avec la parfumerie Maison Robertet. Pouvez-vous nous décrire le processus ?
Depuis 5 ans, je travaille dans mon laboratoire au Majestic sur une macération à ultrasons, qui permet la création de jolis arômes. Puis je distille ma solution à basse pression. Quant à la Maison Robertet, qui se situe à Grasse, elle m'a gentiment initié à l'art de la parfumerie.

Ma volonté est de créer des parfums comestibles, pour que l'olfactif augmente le plaisir gustatif. Je collabore également avec les verreries de Biot avec qui je souffle des verres où l'on peut mettre son nez en premier et libérer les parfums olfactifs. Je fais aussi des verres en céramique avec le potier Tino Aiello avec qui je travaille sur des verres qui gardent le froid.


Vous créez aussi votre propre bière La Blanche du Majestic, parlez nous en.
J'ai créé une bière botaniste, brassée en Italie (maison Extraomnes), avec de l'orange amère bigarade et grains de coriandre qui apportent un goût frais, mais aussi du geranium rosat, extrait en ultrason. C'est une bière très légère, 4,8 %, avec un peu d'amertume et peu gazeuse. On la trouve uniquement à l'Hôtel. Je fais aussi des gins, des sodas citronnelle jasmin, et en ce moment je travaille sur une liqueur herbale.
 

Travaillez-vous sur des accords cocktail et mets ?
Je collabore beaucoup avec Pierre Gagnaire, pour lequel j'ai fait, par exemple, un soda à la betterave, ou encore Jean Montagard, spécialiste de la cuisine végétarienne. J'ai fait des arômes de pain de campagne, d'asperges violettes...

Je travaille toujours avec de magnifiques professionnels, j'aime énormément les personnes, avoir des échanges et apprendre.

Propos recueillis par Sandy Bénard-Ravosier