Vigneron Bordeaux
Château des Annereaux
Lalande-de-Pomerol
De la vigne, des hommes … et du tempsAu gré des vicissitudes subies par son vignoble durant trois siècles, il est un domaine en Lalande de Pomerol qui a su prendre un nouveau départ en misant sur la qualité de son environnement. Le Château des Annereaux, l’un des plus anciens de l’appellation, pour-suit sa montée en qualité depuis que Dominique Hessel en a repris la direction en 2004.
Un outil de production en bon état mais à moderniser, un vig-noble situé sur l’un des meilleurs terroirs du bordelais et une farouche envie de faire renaître la légende familiale après plus de vingt générations de succession en ligne directe… Les conditions étaient réunies pour que le digne descendant de la famille Ponsot remette le domaine sur la bonne voie avec comme objectifs de produire des vins de plaisir et de les faire certifier biologiques en 2010.
Quatre siècles d’histoire en terre de Pomerol
Nous sommes dans le Libournais, sur la partie située la plus à l’ouest de l’aire d’appellation. Sur le lieudit les Annereaux - qui doit son nom à la famille habitant autrefois le hameau – se dresse l’imposant château des Annereaux, dont l’histoire remonte au XVIème siècle.
En témoignent les inscriptions gravées sur sa façade rose, annonçant fièrement les illustres prédécesseurs de la famille Hessel : les Soehnée, Malescot et Ponsot, aïeuls des propriétaires, acquirent en leur temps leurs lettres de noblesse, parfois dans quelques domaines détournés. Vingt générations, riches en fortes personnalités, se sont succédées sur le domaine devenu au fil du temps l’une des références incontournables de l’appellation. Ainsi, peu après la Révolution, Charles-Frédéric Soehnée s’illustra dans la peinture surréaliste, commettant quelques aquarelles aujourd’hui honorablement cotées que l’on peut pour certaines redécouvrir au Louvre. Elève de Girodet, il marqua par son travail d’une année, en 1918, l’histoire de la peinture avant de se tourner vers une carrière d’industriel au service des artistes peintres (il fut l’inventeur du vernis Soehnée). Au début du 19ème siècle, Jean-Michel Soehnée fut, lui, censeur de la Banque de France à Paris. Déjà l’esprit d’entreprise régnait sur les membres de la famille, dont les portraits trônent aujourd’hui encore dans le salon du château au milieu des photographies des petits-enfants…
Plus tard, lorsque l’épidémie de phylloxéra sévit sur le vignoble bordelais, Mme Veuve Caroline Ponsot publia en 1891 le fruit de ses recherches dans un ouvrage dédié à son expérience de la culture des vignes américaines. Cette femme moderne n’était autre que l’arrière arrière grand-mère de Dominique Hessel, et c’est elle qui eut à cœur, avec son fils Armand Ponsot – lequel avait renoncé à intégrer Polytechnique pour diriger son domaine – de laisser ce patrimoine viticole à la descendance familiale. La crise du phylloxera surpassée, l’aïeule se consacra au développement du domaine, laissant Armand Ponsot moderniser le château, procéder au remembrement du vignoble de 35 hectares et rénover les installations de production, les remettant quasiment en l’état où elles se trouvaient en 2004.
C’est alors qu’à l’issue de ces grandes réformes, le contexte économique post-guerre mondiale rendit les affaires difficiles, contraignant la famille à l’arrachage de pieds de vigne sous l’encouragement des primes gouvernementales. En 1956, la vigne était remplacée au profit de l’élevage de bétail et de l’agriculture. Pour faire face, il fallait se résoudre à aliéner le domaine. Plusieurs tentatives de vente ayant échoué faute d’accord (la mairie de Libourne souhaitait notamment dans les années 60 y installer son école d’agriculture), il fut convenu de céder la moitié du domaine à M. Milhade, un négociant viticulteur qui remit le vignoble en état dans les années 1970.
Lorsque ses héritiers proposèrent à Dominique Hessel de racheter leur part d’indivision en 2004, celui-ci n’hésita pas à s’investir complètement pour écrire une nouvelle page de l’histoire du château réunifié. Une revanche qui lui tenait à cœur avec en tête un projet bien précis : produire des vins de qualité dans le plus grand respect de l’environnement.
Quand la valeur des vins n’attend pas le nombre des années…
Si Dominique Hessel se présente lui-même comme un homme extrêmement classique (en citant par exemple son choix de conserver l’étiquette datant de 1920), c’est sans doute pour introduire le fait que ses vins, conformes à son image, le sont tout autant. Il les veut agréables, gourmands, mais se refuse à céder à une certaine mode de la grande extraction, du boisé excessif.
« Je souhaite préserver le fruité, le côté agréable du Merlot, tout en faisant des vins de garde », confirme t-il. Pas de concentration excessive donc, un boisé maîtrisé, un retour au goût d’origine, bref des vins sincères et légers, qui ne saturent pas le palais et savent développer, au fil d’un repas, toute leur sensibilité et leur finesse.
Sur ce terroir constitué de sable, de graviers et de galets, dont les vins sont renommés pour leur finesse et leur rondeur, le château des Annereaux bénéficie d’un vignoble à maturité, l’âge moyen des pieds de vigne étant de plus de 25 ans. Le Merlot y est le cépage dominant.
Dès la reprise, Dominique Hessel a conduit le vignoble en lutte raisonnée, pour laquelle il est certifié depuis 2005. Très vite, il s’est orienté vers la culture biologique, fort de ses expériences à Moulis dans le Médoc, où il possède le Château Moulin-à-Vent. Le travail ne l’effraie pas et les premiers résultats de 2007 ne le décevront pas.
« Une fois l’étape la plus difficile franchie (celle de l’abandon du désherbage et de la réduction des traitements chimiques) il est logique de s’engager en conversion biologique », dit-il.
Sa philosophie est simple : intervenir sur la plante en un minimum de traitements, développer les qualités du terroir et des cépages sans faire des vins de compétition. Ce spécialiste en viticulture a toujours usé fort prudemment des produits phytosanitaires, qu’il connaît bien pour avoir débuté sa carrière d’ingénieur agronome dans l’industrie de la phytopharmacie.
L’avenir enfin assuré
Sa mère faisait partie des membres fondateurs des Baillis de Lalande de Pomerol, l’une des confréries les plus actives du Bordelais. Dominique Hessel, lui, appartient à deux cercles : le Club des vignerons lauréats, un club national qui se réunit chaque année en novembre à Paris, et Assemblage en Bordeaux, association qui œuvre pour le respect du terroir. Un thème cher au cœur de Dominique Hessel, on le sait, lequel ne manque ni les primeurs ni les dégustations.
Après s’être investi durant des années dans les responsabilités syndicales, lorsqu’il fut durant douze ans le Président du Conseil des vins du Médoc puis pendant sept ans Président du Syndicat des crus bourgeois du Médoc, Dominique Hessel se recentre désormais sur la conduite de son domaine.
La commercialisation est bien consolidée : via le négoce bordelais, 70 à 80% de la production est diffusée à l’export. La bouteille à la capsule rose s’est fait une place remarquée, assurant la notoriété du cru.
Son vignoble réunifié, c’est un homme heureux : heureux d’être un maillon de plus dans cette longue histoire, de prendre part à sa continuité ; heureux aussi d’être en mesure de laisser plus tard un vignoble viable à ses propres enfants, si par bonheur il leur venait l’envie d’en prendre la suite…
Christelle Faure-Némery
Château des Annereaux
33500 Lalande de Pomerol
Tél. : 05 57 51 03 01
ou 05 56 58 15 79
Fax : 05 56 58 39 89 www.annereaux.com
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