Le salon Millésime BIO 2025 s'est achevé fin janvier,
quel bilan tirez-vous de cette 32e édition ?
Muriel : Cette 32ème édition a réuni 1 500 exposants venant de 16 pays et a enregistré 9 500 visites avec 80 % d'acheteurs et metteurs en marché français et 20 % d'étrangers.
La présence d’un visitorat ultra-qualifié, constitué de cavistes, de sommeliers, de grossistes, d’importateurs et d’acheteurs spécialisés en provenance d’une cinquantaine de pays à travers le monde, a permis de rassurer quant à la dynamique de la demande internationale, notamment pour les exposants français intéressés par l’export.
Cette édition a aussi été marquée par de nombreux défis, parmi lesquels les tensions sur le pouvoir d’achat et les incertitudes géopolitiques. Mais malgré un marché du vin un peu tendu sur le marché domestique et international, une belle dynamique s’est faite ressentir sur le salon, preuve de l’attractivité de l’événement pour les acheteurs internationaux.
Olivier, vous êtes à l'initiative de l'instauration d'un mobilier identique
pour tous les exposants, qu'est-ce qui a motivé cette décision ?
Olivier : Depuis la création du salon, il y a 32 ans, tous les exposants disposent du même stand, quel que soit leur statut. Mais nous étions sur de simples tables nappées, ne mettant pas en valeur le produit et ne facilitant pas les échanges entre l’exposant et le visiteur.
En 2020, l’association a fortement investi dans un mobilier qualitatif, fabriqué en France, à base de bois, sous forme de comptoirs hauts, de tabourets et d’une signalétique haute individuelle. Un véritable confort pour réaliser une dégustation, et une belle vitrine pour présenter les bouteilles. Cela a permis de renforcer le côté « premium » du salon.
Tous les exposants disposent du même matériel d’exposition, indépendamment de leurs moyens et c’est unique dans l’univers des grands salons professionnels. Cela s’inscrit dans l’ADN de Millésime BIO qui est un salon pour des vignerons, organisé par des vignerons.
Vous avez également développé l’espace « autres boissons alcoolisées bio » et mis en place
le salon version digitale depuis 2021, une façon de séduire un public plus jeune ?
Muriel : Depuis 2019, nous avons effectivement créé un espace pour les autres boissons alcoolisées bio, incluant entre autres la bière, le cidre, les spiritueux…L’idée est de proposer aux acheteurs qui viennent sur le salon un complément de gamme afin qu’ils puissent « sourcer » tous leurs alcools bio dans un même lieu et répondre ainsi aux attentes de leurs clients finaux dont les jeunes. C’est notamment le cas pour les cavistes, les restaurants, les bars à vins…
Le recul du pouvoir d'achat affecte particulièrement les produits biologiques,
souvent perçus comme plus coûteux. Quels moyens sont mis en place
pour rendre les vins bio plus attractifs ?
Olivier : Le contexte est difficile pour le vin en général, pas seulement pour le vin bio. Il y a une déconsommation des produits alcoolisés depuis 2-3 ans. La crise économique engendrée par le contexte géopolitique a effectivement fortement impacté les produits bio, les consommateurs arbitrant leurs achats vers des produits « basiques » peu onéreux. Les indicateurs de la filière des vins bio restent paradoxalement assez encourageants avec un chiffre d’affaires global en progression en 2023 (derniers chiffres connus). Les ventes de vin bio ont ainsi augmenté de 6 % en volume en 2023, même si cela cache certaines disparités avec des indicateurs au vert pour la vente directe et les cavistes alors que la grande distribution est toujours dans le rouge. Une bouteille sur dix vendues en France est bio. Le marché des produits bio dans les magasins spécialisés est reparti à la hausse depuis 2024, espérons que le vin bio suivra le mouvement très prochainement.
Concernant le prix des vins bio, comme pour les vins issus de l’agriculture conventionnelle, il existe des vins bio à tous les prix, de l’entrée de gamme au vin premium. Il faut bien se rappeler que les coûts de production (notamment la main-d’œuvre) sont plus élevés dans le bio car les vignerons passent plus de temps dans leurs vignes, mais ces coûts ne sont qu’une composante du prix d’un vin. Beaucoup d’autres facteurs entrent en jeu, comme la renommée du vigneron, la méthode de vinification…Le fait de boire un vin bio qui n’a pas reçu de produits de traitement de synthèse est également un plus que nous ne pouvons pas quantifier dans le prix de vente ! Les vignerons bio sont également souvent plus modérés dans leur packaging, dans le marketing, ce qui leur permet de compenser afin de proposer des vins à des prix tout à fait abordables.
L’attractivité des vins bio passe par la communication vers le consommateur, à qui nous devons expliquer les bienfaits de ce système de culture pour eux, pour le producteur, pour la planète. Pour cela, nous avons développé un site dédié pour éduquer et répondre aux questions que peuvent se poser tous les citoyens soucieux d’avoir une consommation responsable.
L’Occitanie concentre 35 % du vignoble bio français.
Qu’est-ce qui explique cette forte implantation régionale ?
Olivier : L'Occitanie est la plus grande région viticole de France avec 33 % des vignes françaises et 51 appellations d’origine protégée (AOP) et 36 indications géographiques protégées (IGP).
Avec 58 808 hectares de vignes conduits en agriculture biologique en 2023, l’Occitanie est naturellement le premier vignoble bio de France. Plusieurs facteurs expliquent cette forte implantation : un climat favorable chaud et sec, limitant le développement des maladies fongiques, et l'engagement des vignerons régionaux en faveur du respect de l'environnement qui ont été des précurseurs. Certaines de leurs parcelles n’ont même jamais connu la chimie !
L’Occitanie compte en effet parmi les foyers du mouvement bio en France avec des vignerons qui, dans les années 70-80, ont été parmi les premiers à renouer avec les principes de l’agriculture biologique et œuvrer pour la création du label AB. SudVinBio, association interprofessionnelle de promotion et de défense des viticulteurs biologiques d’Occitanie, a été créée en 1991, juste quelques années après la création du label AB en 1985 dont nous fêtons cette année les 40 ans.
Propos recueillis par Sandy Bénard-Ravoisier
Photos : MINDPROD